Gare à la chute terminale
3 juin
A 2 heures du matin, ordre de départ pour 5 heures. J'évacue un homme et fais réquisitionner une voiture pour les sacs.
Nous partons pour Vroil, Nettancourt, Noyers, Angicourt (abîmée), Lahancourt (amochée), Vilette (très amochée). Pas d'incident grave.
Grande halte près de Lisle en Barrois. Pluie torrentielle. Côteaux boisés, ondulations continuelles, terre rouge, herbes très vertes. La rivière La Chlée.
Nous arrivons à 12h30 et cantonnons à Lisle en Barrois à la ferme de Vaudincourt et à celle de Merchiennes. J'habite avec LEROY et le fils de l'hôte.
Proclamation du Général NIVELLE, qui nous demande encore un effort en attendant l'offensive prochaine des Alliés. Le colonel va voir JOFFRE. On entend le canon. Je remets au commandant LEROY la masse d'infanterie : 199,65 F.
Nous arrivons au 2e étage...Gare à la chute terminale.
Nous sommes 2e Armée. Pourvu que la 5e Division ne soit pas celle de l'homonyme (Jean de NIVELLE)...
Je viens de me raser proprement, peut-être pour la dernière fois. Très ému au fond. Le canon gronde sans cesse.
Qu'allons nous voir et subir ? Il faut ménager l'eau, paraît-il. Elle est rare et c'est de la purée de cadavres.
Assez mauvaise nuit avec LEROY. Je tâche de ne penser à rien ni à personne. JOFFRE a dit au colonel que tout serait fini dans un mois.
La 5e Armée au contraire est pessimiste.