L'énigme d'Allemagne - suite et fin

Il y a deux ans, Jens un correspondant allemand, me fit parvenir une carte postale représentant un soldat français prisonnier au camp de Gardelegen.

En observant attentivement cette carte, j'avais pu reconstituer le nom d'Eugène à partir de sa signature. Le numéro de son régiment que l'on devinait sur son képi avait été confirmé par une des listes de prisonniers parue dans la Gazette des Ardennes.

La recherche de son parcours fut plus difficile. La carte était adressée à Troyes, laissant supposer qu'il était originaire de ce département. Mais bien que le nom de KIRKIS figure sur plusieurs des tables alphabétiques entre 1906 et 1918, un seul portait le prénom Eugène. Malheureusement, à réception de la copie de la fiche matricule transmise par les archives de l'Aube, il s'avéra qu'il s'agissait d'un homonyme.

Deux ans plus tard, en retrouvant cette carte postale, j'ai mieux observé de portrait d'Émile qui m'a paru avoir plus de 20-25 ans. J'ai pensé qu'il s'agissait peut-être d'un homme âgé de 30 ans ou plus qui pourrait être réserviste.

J'ai donc parcouru à nouveau les tables alphabétiques en remontant à partir de 1906.

Sur celle de 1902, figure le nom d'un KIRKIS Eugène. Est-ce notre homme ? Nouvelle demande aux archives de l'Aube en rappelant l'échange précédent, quelques jours d'attente et la copie de la fiche demandée arrive.

Un rapide survol de la fiche vers les unités d'affectation fait apparaître : 160è régiment d'infanterie, un autre le lieu d'internement à Gardelegen !

Le Soldat Eugène KIRKIS était né en 1882 à Saint André (10). Lors de son recrutement, il exerçait la profession de jardinier. Ajourné pour faiblesse en 1903 et 1904, il fut déclaré bon pour le service en 1905. Il accomplit celui-ci au 156è RI jusqu'en septembre 1906 et obtient le certificat de bonne conduite.

Il effectue deux périodes de réserve en 1908 et 1910 au 156è RI.

Rappelé lors de la mobilisation générale, il rejoint le 160è RI le 3 août 1914.

Une mention portée sur la fiche : " Parti avec la 17è compagnie ", laisserait supposer qu'il était affecté au 360è RI, régiment de réserve. Mais le lieu de capture indiqué plus loin : Fresnoys confirme quant à lui qu'il s'agit bien du 160è RI après lecture du JMO de ce régiment qui était dans ce secteur le 25 septembre 1914.

Eugène est capturé le 25 septembre 1914 à Frenois les Roye (80).

Son nom apparaît sur une des listes consultables sur le site de la Croix-rouge internationale datée du 23 janvier 1915. Seul le lieu de capture diffère : Voormezele en Belgique.

Fiche matricule, liste de la Croix-rouge, Gazette des Ardennes et carte postale confirment bien le lieu de détention : Gardelegen.

Eugène y est resté en captivité jusqu'en janvier 1919.

Les registres d'état-civil de la commune de Saint-André nous apprennent qu'Eugène s'était marié en décembre 1919 à Troyes et qu'il est décédé au mois de juin 1957 dans sa 75è année.